Article écrit par Equipe Marketing

PME et micro-entreprises : combien vaut votre société ?

Chaque entrepreneur, à un moment ou à un autre, s’est posé la question cruciale : « Mais en fait, combien vaut ma boîte ? » C’est une interrogation qui résonne avec une intensité particulière dans l’esprit des dirigeants de PME et micro-entreprises. Souvent, ces entreprises sont bien plus qu’une source de revenus ; elles représentent un héritage, un rêve réalisé, ou encore le fruit d’années de travail acharné. Connaître la valeur de son entreprise n’est pas seulement un exercice comptable ; c’est aussi embrasser l’histoire, les sacrifices et les succès qui ont façonné son parcours. C’est dans cette optique que nous explorons les différentes méthodes et approches d’évaluation d’entreprises, qui vont au-delà des simples chiffres pour toucher à l’âme même de votre entreprise.

En général, l’évaluation d’une entreprise intervient particulièrement dans les contextes de fusions et acquisitions ou encore en cas d’entrée en bourse. En ce qui concerne les PME et micro-entreprises cependant, les raisons primaires sont souvent la succession et plus rarement la vente de l’entreprise à des investisseurs stratégiques ou financiers. Mais savoir combien vaut votre entreprise, même si vous ne souhaitez pas vous en défaire, est une donnée éclairante qui vous permet de prendre la pleine mesure de ce que vous avez accompli et de comment vous positionner sur le marché.

De nombreuses méthodes d’évaluation existent. Selon l’activité et la taille de l’entreprise, il est possible de les catégoriser comme suit (dans l’ordre croissant de technicité et de complexité) :

  1. Approche bilancielle qui détermine la valeur de l’actif net, dite aussi valeur substantielle ;
  2. Approche bénéficiaire qui aboutit à une valeur de rendement ;
  3. Approche hybride qui est une combinaison des deux approches précitées ;
  4. Approche par les flux dont la plus connue est la méthode des flux de trésorerie actualisés ;
  5. Approche du marché avec la méthode des multiples ou encore des transactions comparables.

 

Il faut souligner que souvent, l’évaluateur se base sur plusieurs approches d’évaluation afin de déterminer une fourchette pertinente de prix.

L’approche 1 se base sur la valeur des capitaux propres qui résultent d’un bilan retraité, c.à.d. que chaque poste est présenté à sa valeur économique et non comptable. En ce sens, il s’agit d’une valorisation orientée sur le passé (la création de valeur pour une entreprise depuis sa création). Or, un acheteur s’intéresse à la capacité future d’une entreprise à créer de la valeur. Par contre, pour le vendeur, la valeur substantielle représente un seuil psychologique en-dessous duquel il ne voudra jamais négocier. Il faut aussi être attentif au fait que cette approche ne capte pas la valeur du goodwill. En effet, les éléments du goodwill tels que l’image de marque, le portefeuille de clients, le savoir-faire du management ou encore le charisme du dirigeant dans la gestion des affaires ne sont pas présentés dans les divers postes d’un bilan, même retraité et présenté selon le concept de true and fair view.

L’approche 2 se concentre sur la capacité bénéficiaire d’une entreprise dans le temps, en général 3 à 5 ans. Il s’agit donc une approche orientée sur le futur. L’inconvénient est que le résultat d’une entreprise est influencé par les méthodes comptables appliquées. En utilisant cette méthode, l’évaluateur doit normaliser le résultat dans ses projections, en décorrélant le plus possible le résultat de l’impact des méthodes comptables.

Pour une PME, l’approche hybride peut souvent s’avérer suffisante. La plus connue, appelée communément la méthode des praticiens est une moyenne pondérée de la valeur de l’actif net pour 1/3 et celle de rendement pour 2/3.

Beaucoup affirment que ce qui fait la valeur d’une entreprise, c’est sa capacité à générer du cash. L’approche 4 capte cette capacité. Les analystes financiers utilisent l’adage « Profit is an opinion but cash flow is a fact » pour rappeler, à juste titre, que le cash ne peut pas être manipulé à l’opposé d’autres indicateurs tels que le résultat. Elle a aussi l’avantage d’intégrer tout éventuel goodwill dans les projections. La méthode des flux de trésorerie actualisés (DCF : Discounted Cash Flows) procède à une projection des flux de trésorerie futurs et actualise ces flux pour obtenir la valeur qu’elles ont aujourd’hui.

Le DCF peut tout à fait s’appliquer à l’évaluation d’une PME. Cela étant dit, l’évaluateur doit toujours se poser la question du coût-bénéfice de telles approches d’évaluation pour une PME. En effet, cette approche est techniquement complexe et très sensible quant au choix du taux d’actualisation et du taux de croissance soutenable à long terme. L’évaluateur devra user de méthodes complexes pour extrapoler ces deux taux. Le coût pour ses prestations va être sensiblement plus élevé. Tout sera alors une question de contexte et de motif d’évaluation. Si par exemple, la PME est approchée par un fonds d’investissement de type private equity, l’approche DCF devient quasi incontournable de même que celle des multiples. Par contre, s’il s’agit un propriétaire de PME qui veut transférer son entreprise à ses enfants, alors l’évaluateur devrait faire preuve de pragmatisme en s’appuyant sur des approches moins couteuses mais tout à fait pertinentes au regard du contexte.

L’approche 5 est une méthode de valorisation dite relative. L’une des activités des fournisseurs d’informations financières consiste à évaluer les entreprises cotées par secteur de l’industrie. Puis, pour chacune des entreprises cotées dans un secteur, ils déclinent sa valeur en termes de son chiffre d’affaires, EBIT, EBITDA, résultat ou tout autre indicateur clé pour obtenir ce qu’on appelle des multiples. A titre d’exemple, si la valeur (EV) d’une entreprise cotée est de CHF 800’000 avec un EBITDA de CHF 100’000, alors son multiple EBIDTA, noté EV/EBITDA est de 8.

Puis, à partir des multiples obtenus pour toutes les entreprises cotées, les analystes financiers publient des valeurs médianes de multiples pour chaque secteur d’activité.

Un évaluateur mandaté pour valoriser une PME ou micro-entreprise ne peut pas utiliser ces multiples en l’état. En effet, l’évaluateur doit tenir compte de la notion du risque dans son approche. Or, les risques financiers d’entreprises non cotée sont plus élevés que ceux d’entreprises cotées. Pour intégrer le risque dans ses calculs, l’évaluateur va utiliser des techniques pour déflater les multiples d’entreprises cotées. Pour faire suite à notre exemple, en déflatant le multiple EV/EBITDA de 8, il pourrait aboutir à un multiple de 6 qui serait applicable à l’entreprise non cotée qu’il veut évaluer.

A noter qu’il existe des multiples pour la valeur des actifs d’une entreprise (Enterprise Value) et d’autres pour la valeur de ses actions (Equity Value). Dans les transactions d’entreprises, c’est cette dernière qui sera déterminante car il s’agit d’une négociation menée sur la valeur des actions, objets de la transaction.

Le multiple le plus prisé est l’EBITDA. En effet, l’EBITDA est le résultat opérationnel avant les amortissements, les intérêts et les impôts. En ce sens, l’EBITDA est un bon représentant de la capacité génératrice de trésorerie, notion essentielle dans la valorisation.

Un évaluateur néanmoins utilisera toujours plusieurs multiples qui lui permettent d’approfondir son analyse et d’établir une fourchette de valeurs pertinentes.

Finalement, et pour autant qu’il y ait eu des transactions (comparables) récentes dans le même secteur d’activité que la PME, l’évaluateur peut s’en inspirer comme une référence (benchmark) et affiner encore son analyse.

Outre les diverses approches, l’environnement économique actuel et les tendances du marché sont des facteurs externes qui influent également sur la valorisation. De même, la perspective de croissance et les opportunités futures sont des vecteurs essentiels de la valeur perçue par un investisseur potentiel (par exemple, pour une start-up qui est en passe d’enregistrer une patente révolutionnaire). Un investisseur achète avant tout la croissance future d’une entreprise et sa capacité à créer de la valeur.

Malheureusement, les erreurs de valorisation, qui ne sont pas rares, sont souvent dues à un manque d’expertise et à des biais comportementaux. Un vendeur, par exemple, doit savoir qu’il est tributaire du biais de dotation (endowment bias). Il s’agit d’un biais émotionnel qui tend à donner plus de valeur à quelque chose que l’on possède, comparé à lorsqu’on ne la possède pas.

L’auto-évaluation peut être risquée, d’où l’importance de s’appuyer sur des spécialistes dans l’analyse financière. Ces experts apportent non seulement leur expérience et leurs connaissances techniques, mais aussi une objectivité qui permet une évaluation précise et justifiable.

Enfin, si les PME et micro-entreprises doivent retenir trois conseils pour la valorisation de leur entreprise, ce seraient : reconnaître et gérer ses biais émotionnels, assurer la qualité et la précision des informations financières, et faire appel à des experts indépendants pour une évaluation objective. En somme, connaître la valeur de sa société n’est pas un luxe, mais une nécessité stratégique pour toute entreprise souhaitant s’engager sur la voie de la croissance et de la pérennité.

 

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